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  Le licenciement d'un travailleur

Damien Revers, décembre 2024


En cette période d’austérité financière, plusieurs associations ont dû donner des préavis à leurs travailleurs et travailleuses. Un rappel de la réglementation relative au licenciement pourrait s’avérer utile.

Pour licencier un travailleur, il y a 2 options (hors licenciement pour faute grave) :  
les parties ont le choix de donner un préavis pendant lequel le contrat de travail continue d’être exécuté (congé moyennant préavis) ou bien de rompre immédiatement celui-ci, moyennant le paiement d’une indemnité de rupture (congé avec rupture immédiate).

1. Le congé moyennant préavis presté

1.1. Notions

En cas de rupture moyennant préavis, le contrat de travail ne prend fin qu'après l'expiration du délai de préavis. Durant ce délai, le travailleur continue à exécuter ses prestations. De son côté, l'employeur continue à lui fournir le travail convenu et à payer la rémunération. Toutefois, le “congé” (euphémisme juridique pour parler de “licenciement”) est définitif et irrévocable et implique donc la rupture du contrat de travail à la fin du préavis.

Dès lors, en droit du travail belge, la pratique d'un “préavis conservatoire” dans le cas d'incertitudes financières n'est pas formellement reconnue ou encadrée par la loi. Cela signifie que le préavis ne peut pas être simplement annulé ou “déchiré” si la situation s'améliore, en vertu du principe de l'irrévocabilité du préavis. Si l’employeur souhaite que le travailleur reste, il doit obtenir son consentement formel pour annuler le licenciement. En pratique, cela nécessite une nouvelle convention entre les parties.

1.2. La notification du préavis

Mentions obligatoires

La notification du préavis doit, pour être valable, être faite par écrit et mentionner le début et la durée du préavis. Si la notification ne comporte pas ces mentions, cela équivaut à une rupture immédiate du contrat de travail.  L'auteur du “congé” sera alors redevable d'une indemnité de rupture.
Lorsque le préavis est donné par l'employeur, la notification ne peut se faire que :
- par lettre recommandée (la notification sort ses effets le 3ème jour ouvrable suivant son expédition) ;
- par exploit d'huissier (la notification sort ses effets immédiatement au moment de la remise de l'exploit par l’huissier).
Si vous ne respectez pas ces deux conditions, le préavis sera annulé.

Motivation du licenciement

Vous devez indiquer par écrit la raison du licenciement. Évitez les phrases telles que “réorganisation de l’association” ou “le travailleur ne convient pas” car elles n’expliquent pas de manière concrète pourquoi le travailleur a été licencié. Il est conseillé de documenter le mieux possible les motifs du licenciement. Sans documents justificatifs, il sera en effet nettement plus facile pour le travailleur d’invoquer devant le tribunal que le licenciement est abusif.  
Si le licenciement est lié à une insatisfaction vis-à-vis du travailleur, il est utile de constituer un dossier le concernant, dans lequel vous aurez repris tous les rapports d’évaluation et les éventuels avertissements écrits. Pour éviter tout vice de procédure et veiller à ce que la formulation de la motivation soit adéquate, le recours à un juriste est conseillé.
Si vous avez des difficultés financières, celles-ci peuvent également être invoquées pour motiver un licenciement. Soyez cependant le plus précis possible et évitez les formulations vagues telles que “raisons économiques”.
Par ailleurs, bien que vous n’y êtes pas obligé, veillez à expliquer au travailleur les motifs concrets qui ont conduit au licenciement (les mêmes que ce que vous indiquerez sur le formulaire C4, qui est le document que vous devrez remettre à votre travailleur à la fin du préavis et attestant officiellement de la fin de la relation de travail).

1.3. Début du préavis

Le délai de préavis commence à courir le lundi suivant la semaine pendant laquelle le congé a été notifié. Exemple : un employeur notifie un licenciement par recommandé, envoyé le mercredi (25/11). La notification est effective à partir du 3ème jour ouvrable qui suit son expédition, càd à partir du samedi 28/11. Le préavis commence à courir le lundi 30/11.

1.4. Dispense de prestation

Les parties peuvent convenir que le travailleur sera dispensé de prestation en cours de préavis. Dans une telle hypothèse, le travailleur perçoit sa rémunération à la fin de chaque période de paie et le contrat de travail n'est définitivement rompu qu'à la fin du délai de préavis. 

1.5. Délai de préavis

Pour connaître les délais de préavis, je vous invite à consulter les liens suivants :

Ainsi qu’un module de calcul : https://hrcalculations.securex.eu/period-of-notice

1.6. Suspension du délai de préavis

Dans un certain nombre de cas déterminés par la loi, l'écoulement du délai de préavis sera suspendu.
Cas de suspension du délai de préavis : maladie ou accident / vacances annuelles / congé de maternité (ou écartement de la femme enceinte ou allaitante) / interruption de carrière complète dans le cadre du crédit-temps ou d'un congé thématique / chômage économique / congé pour raisons impérieuses / congé de naissance ou d’adoption.
La suspension du délai de préavis a pour effet que le contrat de travail prend fin à une date postérieure à celle qui découle de la notification écrite du préavis. La suspension du délai de préavis est uniquement prévue en cas de licenciement.
En cas de démission, le délai de préavis ne sera jamais suspendu.

1.7. Congé pour la recherche d'un nouvel emploi (= congé de sollicitation)

Pendant la durée du préavis, le travailleur a le droit de s'absenter du travail à concurrence d’un jour (ou deux demi-jours) par semaine, avec maintien de sa rémunération en vue de rechercher un nouvel emploi. Le travailleur ne peut utiliser ce congé que pour le motif de recherche d'un nouvel emploi. Le travailleur à temps partiel a droit au congé de sollicitation proportionnellement à son temps de travail.

1.8. Contre-préavis

Lorsqu’il est licencié moyennant préavis, le travailleur peut à son tour rompre le contrat moyennant un préavis réduit s’il a trouvé un autre emploi.
Le travailleur doit respecter les délais de contre-préavis suivants, en fonction de son ancienneté :

  • De 0 à moins de 3 mois = 1 semaine de préavis
  • De 3 mois à moins de 6 mois = 2 semaines de préavis
  • De 6 mois à moins de 12 mois = 3 semaines de préavis
  • A partir d’un an = 4 semaines de préavis

1.9. Le reclassement professionnel (outplacement)

Il s’agit de fournir au travailleur licencié des outils lui permettant de retrouver un travail.
Le reclassement professionnel se définit comme un ensemble de services et de conseils de guidance fournis individuellement ou en groupe par un prestataire de services, pour le compte d'un employeur, afin de permettre à un travailleur de retrouver lui-même et le plus rapidement possible un emploi auprès d'un nouvel employeur ou de développer une activité professionnelle en tant qu'indépendant.
Le reclassement professionnel peut être imposé par la loi ou être volontaire.

Le régime général de reclassement professionnel s’applique lorsque le travailleur :

  • n’est pas licencié pour motif grave ;
  • a droit à un délai de préavis d’au moins 30 semaines.

Pour connaître les conditions, le déroulement : https://emploi.belgique.be/fr/themes/contrats-de-travail/outplacement/outplacement-regime-general

Si le travailleur a 45 ans et plus, et un an d’ancienneté de service ininterrompue au moment du licenciement, un régime de reclassement professionnel spécifique s’applique. Pour connaître les conditions, le déroulement : https://emploi.belgique.be/fr/themes/contrats-de-travail/outplacement/outplacement-regime-particulier


2. Licenciement moyennant le paiement d’une indemnité de rupture

La partie qui rompt le contrat de travail sans motif grave ou sans respecter le délai de préavis, ou encore moyennant un délai de préavis insuffisant, doit payer à l'autre partie une indemnité de rupture (on parle aussi d’indemnité de congé ou encore d’indemnité compensatoire de préavis). Dans une telle hypothèse, le contrat est rompu immédiatement.

Absence de formalisme

Ce type de rupture ne requiert aucune formalité particulière. Légalement, la rupture peut être simplement verbale. Il est toutefois fortement recommandé de faire suivre la rupture d’un écrit de manière à acter celle-ci, à la justifier (voir “motivation du licenciement” ci-dessus), et à pouvoir en apporter la preuve en cas de contestation.

Calcul

L’indemnité est égale à la rémunération en cours correspondant soit à la durée du délai de  préavis qui aurait dû être notifié, soit à la partie de ce délai restant à courir.

Mensualisations

L’indemnité doit en principe être payée en une fois. Toutefois, l’entreprise reconnue comme étant en difficulté ou qui connaît des circonstances économiques exceptionnellement défavorables, peut payer l’indemnité des travailleurs licenciés par mensualités.

Nous n’abordons pas ici le cas du licenciement collectif, qui doit respecter des conditions spécifiques et une procédure particulière.
Est considéré comme “licenciement collectif”, tout licenciement qui affecte, au cours d'une période de 60 jours, au moins 10 travailleurs ou plus.

Pour plus d’infos : https://emploi.belgique.be/fr/themes/restructuration/licenciement-collectif

Damien Revers
 Coordinateur administratif et financier / Service juridique

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