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Symbioses - Magazine - Editorial

Magazine Symbioses n°142 : Connaissez-vous vraiment le cycle de l’eau ?

Symbioses 142 - Connaissez-vous vraiment le cycle de l’eau ?

Dans les rivières et les mers, dans le sol, dans l’air, dans tout être vivant, dans nos aliments… : l’eau est partout. Indispensable à la vie. Fascinante, elle se déplace et se transforme, dans un cycle souvent perçu comme immuable. Pourtant, l’humain dérègle dangereusement ce cycle et tarit cette ressource dont il dépend, à force de détourner son cheminement naturel, de pomper dans les nappes souterraines, de modifier le climat, d’imperméabiliser les sols, de surconsommer, de gaspiller…
Au fil du dossier thématique de ce Symbioses n°142, plongeons dans une série de réflexions, de solutions et d’initiatives éducatives au cœur de l’eau.

Date de parution : décembre 2024

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Editorial

Connaissez-vous vraiment le cycle de l’eau ?

Sortir de l’amnésie

Souvenez vous, la Vesdre et l’Ourthe, en 2021. Rues inondées, maisons éventrées, vies emportées. Depuis, l'eau a coulé sous les ponts, lentement ; le temps nécessaire à la reconstruction progressive des victimes et des infrastructures, à l’élaboration de mesures d’adaptation et de prévention (dont on attend encore la complète mise en place).

Depuis, l’eau a aussi coulé par-dessus les ponts, ailleurs. Comme en cette fin octobre, dans plusieurs régions d’Espagne, de France et d’Italie, mais aussi à La Mecque, au Nouveau Mexique, à Kinshasa, aux Philippines, en Iran... Toutes frappées d’inondations dévastatrices. Comme un mois plus tôt, en Autriche, en Pologne, en Tchéquie, en Slovaquie et en Roumanie. Et j'en oublie. Partout, des images effrayantes de torrents de boue, de voitures empilées, de familles déchirées, de régions sinistrées ; d’hommes et de femmes qui souffrent – les plus pauvres étant les plus touché·es – mais qui s’entraident. Partout, on parle de « jamais vu », d’événement « exceptionnel ». On a pourtant l’impression que l'histoire se répète, dans un cycle infernal.

Derrière ce cycle, il y a celui de l’eau, profondément modifié par les activités humaines. Le GIEC l’annonce depuis plus de trente ans : les changements climatiques accentuent les deux extrêmes du cycle hydrologique. Plus d’épisodes de pluies extrêmement abondantes, mais aussi plus de périodes de sécheresses prononcées – en effet, ailleurs ou à d’autres moments, l’eau manque dangereusement. Aux changements climatiques s’ajoutent l’artificialisation des sols, le détournement des cours d’eau, la surconsommation d’eau et d’espaces.

Prenons l’exemple de Valence (plus de 200 morts), où il est tombé davantage de précipitations en trois heures que ce qui était tombé dans la région en 21 mois précédents. Il y a cinquante ans, près de 9000 hectares de vergers auraient absorbé une partie de ces pluies torrentielles. Ils ont, hélas, disparu depuis, sous l’effet de l’urbanisation (1). Beaucoup d’habitant·es et de politiques ne s’en rappellent sans doute pas, frappé·es d’amnésie écologique, ce phénomène d’acclimatation des êtres humains, au fil des générations, à la dégradation de leur environnement (2).

A regarder le résultat des récentes élections en Europe, aux Etats-Unis ou même chez nous, peut-être cette amnésie s’élargit-elle ? Les électeurs ont majoritairement voté pour des gouvernements qui – c’est annoncé – vont sacrifier une partie des ambitions environnementales sur l’autel de la rigueur budgétaire et de la compétitivité économique. « Stop à l’écologie punitive », martèlent-ils. En oubliant que l’inaction climatique coûtera davantage – 2 % du PIB belge, dans le scénario le plus pessimiste (3) – qu’une politique climatique ambitieuse (4).

Pour lutter contre cette amnésie écologique, l’éducation et la sensibilisation à l’environnement sont de puissants remèdes. Pour se (re)connecter à l’environnement passé, présent et futur. Pour irriguer la compréhension fine des cycles naturels. Pour imaginer d’autres façons d’habiter le territoire. Pour développer le pouvoir d’agir, à une époque où on ne parle que de pouvoir d’achat. Pour entretenir la mémoire des catastrophes dites « naturelles », et se rappeler collectivement des comportements et politiques à adopter, à la fois pour les éviter et pour y faire face. Comme disait le psychologue Serge Tisseron : « La mémoire n’est pas faite pour qu’on se souvienne, elle est faite pour qu’on agisse »(5).


Christophe Dubois, Directeur du Réseau IDée


(1) AVANT/APRES. Inondations meurtrières en Espagne : dans la région de Valence, l'urbanisation galopante a aggravé les dégâts, France Info, 2024.
(2) https://fr.wikipedia.org/wiki/Amnésie_écologique
(3) https://climat.be/doc/seclim-be-2020-spm-fr.pdf
(4) L’inaction politique nous coûtera beaucoup plus cher qu’une politique climatique ambitieuse, Coalition Climat, 2024
(5) Dans le numéro de Symbioses N°132, consacré aux inondations, pp.8-9.

 

Christophe Dubois

Directeur général 

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